L'Art au service de la liberté

 Eric Bossard  peint pour Aung San Suu Kyi.

www.ericbossard.com

   Que représente pour vous la Birmanie ?

 La Birmanie, pour moi, c’est le souvenir d’un voyage que j’ai fait  en 1982 de sept  jours ; c’était le temps autorisé pour les voyageurs à cette époque; Ce qui m’avait alors impressionné, c’était de découvrir que, par rapport aux pays himalayens, aux tons chauds, rouge sombre et brun  bordeaux, les couleurs y étaient  plus kitsch; la Birmanie était plus asiatique, plus colorée.

 D’où le choix des  teintes vives, et ensoleillées de votre tableau. Mais, bien  que nous soyons dans le non-figuratif, que symbolisent  les déchirures qui zèbrent votre tableau ?

Le côté politique, la Birmanie  déchirée  depuis des  années. En fait, mon tableau est un collage, confectionné à partir  d’affiches  déchirées  dans la rue. Je choisis ces dernières  à cause de leurs couleurs, de leurs trames, de leurs  grains,  je les déchire puis  je les recompose et les  recolle. C’est l’affiche qui est la matière première de l’œuvre présentée. Les nouveaux réalistes m’ont inspiré, particulièrement Jacques Mahé de la Villeglé. En revanche, si  ce dernier prétend faire du ready made (c’est-à-dire qu’il trouvait des affiches déjà déchirées et qu’il les exposait),  je déchire moi-même les affiches et recompose un tableau. Les affiches sont mes tubes de peinture.

Au niveau symbolique, les déchirures de mon tableau représente celles de la Birmanie. J’espère qu’elles ne sont que transitoires et que les Birmans auront  le libre choix de leur avenir. En disant cela, je me fonde sur mon expérience  d’ethnologue et de délégué au CICR. A ce titre, j’ai une perception moins ethnocentrique de ce que peut être un régime, dans le sens où la référence à la démocratie ne doit pas être un absolu. C'est là, à mon sens, qu’intervient  la liberté de choix des Birmans quant au régime dans lequel ils veulent vivre. Il existe  d’autres  régimes  qui  peuvent correspondre aux Birmans : une fédération, basée sur le concept de la région par exemple. Les droits de l’homme  ne sont pas universels , l’homme existe  en tant que famille, clan, société , les droits existe  existe  mais pas les droits de l’Homme, parler des droits de l’Homme c’est illusoire Homme, que sous-tend la démocratie, ne sont pas universels car l’homme n'existe pas seul mais au sein d’une famille, d’un clan ou d’une société. Parler des droits ethniques d’accord, mais parler des droits de l’Homme, à mon avis, est illusoire…..

Propos recueillis par  Danielle Schibler / ASB